14h27 - Je suis inlassablement sur mon lit d'hôpital. L'odeur me semble toujours aussi infecte qu'à mon arrivée et le plateau repas qu'on m'a servi me donne autant la nausée que les médicaments qu'ils me font prendre pour mon foutu cancer. " Mme Hawkins, les cellules se sont propagés, votre cancer s'est avancé au stade 3... Il va falloir vous hospitaliser, au moins pendant un moment. " L'annonce avait eu l'effet d'une bombe sur moi. Qu'allais-je bien pouvoir faire d'Evan ? Certes il était grand et autonome mais il avait besoin qu'on s'occupe de lui, une fois la nuit tombé, il restait mon tout petit bébé.

Evan avait chamboulé ma vie, il l'avait modelé à sa façon. Nous nous étions apprivoisé et nous avions appris à rythmer nos vie ensemble. Nos disputes étaient rares mais violentes et concernaient toujours la même personne : son père. Mon premier amour, mon seul grand amour à vrai dire... Je l'avais aimé à en faire passer son bonheur avant le mien, sans doute aussi celui de son fils par la même occasion. Mais vous savez vous vous fermez dans votre silence, votre secret. Les mois passent puis les années et votre secret est scellé à jamais enfin... jusqu'à ce qu'un cancer vienne détruire tout ce que vous aviez construit.  Ce cancer était arrivé comme un cheveu sur la soupe, de nulle part et s'était installé comme si on l'avait invité à emménager. Nous allions surmonter ça, comme nous l'avions toujours fait jusqu'à aujourd'hui. De toute façons une autre issue était impossible.  


Je l'observais discrètement du coin de l’œil. Le professeur l'avait déplacé à mes côtés, j'étais l'élève modèle, alors avec moi il ne risquait pas de parler ou d'être diverti par quoi que ce soit. Nos regards se croisèrent et c'est à cet instant précis je crois que j'en suis littéralement tombé amoureuse. Il m'a fallu du temps pour réaliser que ce que je ressentais pour lui était de l'amour, c'était nouveau pour moi. Ses sourires me troublaient et sa façon de me parler franchement me mettait mal à l'aise. Je l'observais avec sa bande, il était leur leader, il savait se faire respecter et imposait le respect. Moi, il me vendait du rêve. Léo Frost c'était son nom. C'était une tête brulée, le dur à cuire du lycée avec sa bande mais bizarrement il ne m'effrayait pas, il me rendait admirative. Tout le monde était fasciné et aurait aimé lui ressembler je crois à cette époque... Mon côté naïve et rêveuse me poussait à imaginer notre vie future, ce grand mariage dont j'avais toujours rêvé et nos enfants qui couraient autour de nous alors que lui ne connaissait peut-être même pas mon nom. Je me surpris à attendre ce cours de mathématiques avec impatience, moi qui était pourtant plus littéraire que scientifique. On se parlait, on se souriait et parfois même nous rigolions ensemble finalement...  

La soirée la plus importante de l'année était enfin arrivé. Nous nous étions tous vêtu de notre plus belle robe ou de notre plus beau costume. Je savais que je verrai Léo, il me l'avait dit en mathématiques qu'il espérait m'y croiser pour pouvoir danser avec moi... Amoureuses et romantique que j'étais évidemment que j'allais y aller. Je l'aperçus avec ses amis, il était d'une élégance éblouissante et à entendre les gloussements des filles qui m'entouraient je n'étais pas la seule à l'avoir remarqué. Quand il me remarqua, il m'embarqua avec lui sur la piste. Ses mains étaient chaude et réconfortante, j'étais heureuse et amoureuse. Je crois que c'est à cet instant là que je le réalisai vraiment. On alla faire un tour dans sa voiture et nos corps cédèrent ensuite à la tentation de se goûter,  de se toucher... Ce fut l'une des plus belles nuits de ma vie. Nous nous aimions, je le savais, malgré les silences de Léo et ma timidité notre amour était devenu une évidence.

Les semaines passaient, j'étais heureuse et comblée. Quand d'autres auraient fait de leurs différences une distance avec Léo nous en faisions notre force. Il m'apportait cette petite touche de folie qu'il me manquait, quand moi je l'apaisais. Nous formions le ying et le yang. Alors que dernièrement je n'étais pas au top de ma forme physiquement, c'est un rendez-vous chez le médecin qui clarifia mon état : J'étais enceinte de trois mois et demi. Mon monde se pétrifia et je me mis à douter. A présent, je n'étais plus sûr de rien... Léo m'aimait-il vraiment pour accepter un enfant à notre âge ? Je ne savais pas encore mais vu la date de conception, à présent je n'avais plus d'autres choix que de le garder. Alors que j'allais le voir pour lui annoncer la nouvelle, il me prit les mains et m'annonça : " Hope, mon école m'a pris... je suis accepté ! " Il était fou de joie et sautait dans tous les sens. J'étais stoïque, ne sachant pas quoi faire. Devais je le féliciter ? Lui annoncer cette nouvelle qui allait tout gâcher ?  Mon silence prit le pas et je partis sans un mot... J'ai toujours supposé que ce jour là, Léo à dû penser que je n'étais pas heureuse pour lui, pensant plus à mon bonheur qu'au sien. Il avait tout faux. J'aurai voulu lui sauter dans les bras, l'embrasser et lui dire qu'on se retrouverait ensuite mais avec ce que mon ventre lui cachait, un futur sans moi était sans doute mieux pour lui.