Avoir un enfant est le plus beau cadeau de la vie ! Voilà ce que 90% des gens sur cette planète pense au moment de la naissance de leur premier enfant. Le destin aura décidé que Brant naîtra dans une famille faisant partie des 10% restant. Ce n'était un secret pour personne que les Lincoln ne voulaient pas avoir d'enfants. Voisins, familles, amis... Tous étaient au courant de cette prise de position plutôt drastique ce qui décupla l'effet de surprise lorsqu'ils apprirent qu'Helen et Mark Lincoln allaient devenir les parents d'un petit garçon. Les symptômes avaient été là dés le début mais aucun des deux n'avait voulu croire que l'impossible était arrivé. Et pourtant, en ce matin d'avril, Helen accoucha d'un beau petit garçon. Beaucoup avait pensé que le petit garçon serait un enfant de plus maltraité par ses parents, en manque d'amour. Un de ses enfants que l'on retrouverait plus tard, à l'adolescence, en train de voler l'épicerie du coin ou en train de voler une voiture. Mais, chez les Lincoln, rien ne se passait comme prévu. L'arrivée de Brant bouleversa la famille, tant au niveau de leur vie quotidienne que dans la perception de leur vie. Deux ans après son arrivée, des jumeaux vinrent rejoindre la fratrie et deux ans plus tard une petite fille. Âgée de plus de quarante ans, Helen mit au monde un dernier enfant, un petit garçon cinq ans après la naissance de Brant.
Dire que la vie des Lincoln était devenue un parcours du combattant quotidien serait un euphémisme ! Helen, responsable commerciale dans une entreprise de cosmétique, avait arrêté de travailler pour se consacrer à l'éducation de ses enfants. Le père, architecte, travaillait d’arrache-pied pour nourrir toute sa famille, effectuant des heures supplémentaires à gogo pour subvenir à tout leur besoin. Brant a donc eu une enfance que beaucoup qualifierait d'heureuse. Le petite garçon n'a jamais manqué de rien et surtout pas d'amour. Étant l'aîné, sa mère lui a rapidement laissé le champs libre dés que son âge le lui en a permis. Brant était un petit garçon turbulent mais affectueux au possible. Cette qualité lui a, d'ailleurs, permis d'échapper à un grand nombre de punitions. Au contraire de beaucoup d'enfants, le petit garçon n'a jamais montré le moindre signe de jalousie lors de l'arrivée de ses frères et sœurs. Il semblait même plutôt heureux de voir arriver des partenaires de jeux. Bien que cette vie là, il ne la voulait pas, sa mère n'a eu de cesse de répéter depuis qu'elle n'aurait changé ses enfants contre rien au monde.

Le passage à la vie d'adulte est un des moments les plus délicats de la vie d'un homme. Le moment où on décide de voler de ses propres ailes, de se détacher définitivement de la protection que peut offrir le foyer familiale. Brant reconnaît sans honte qu'il avait été plutôt soulagé le jour où il a passé la porte de la maison qu'il avait habité pendant dix huit ans. Ses cadets étaient en pleines crises d'adolescence et la vie chez les Lincoln était parfois à la limite du vivable. Si couper le cordon ombilical ne posait pas de problème, trouver sa voie sur cette Terre était autre chose. Bon élève, Brant ne s'était jamais attardé sur les possibilités d'avenir qui s'offraient à lui. Insouciant, il s'était contenté de vivre sa vie d'adolescent normal. C'est donc dans la panique que lorsqu'il se retrouva à quelques semaines d'être diplômé le jeune homme commença à postuler dans différentes universités. Le fait de s'y prendre en retard lui referma de nombreuses portes malgré un dossier impeccable. Il fallût l'intervention de son père, ancien étudiant de l'Université de Berkeley et ami proche du doyen pour que le jeune homme trouve une place dans cette prestigieuse Université. Une question restait en suspend : Qu'allait-il étudier ? Après mûre réflexion, Brant choisit la médecine sous le regard méfiant de ses parents. Ce choix sortait de nulle part et aujourd'hui encore, le chirurgien avouait que c'est le destin qui avait décidé pour lui. Les premières années furent difficile, entre l'intégration dans la confrérie Alpha-Thêta et l'acclimatation à un nouveau rythme de vie. Il réussit néanmoins à passer la première année puis la deuxième. Ses parents, qui s'étaient attendus à un changement de cursus, étaient circonspects de voir que leur aîné semblait avoir trouvé sa voie. Les années défilaient au rythme des cours, des révisions, des soirées arrosées, des réveils au côté d'inconnues... Jusqu'à ce que le blond ne commence l'internat et que sa vie, plutôt banale, jusque là prenne une tournure un peu plus dramatique.

« Et si on se mariait ? » La cafétéria était noir de monde, à croire que tous les internes et titulaires avaient décidé de prendre leur pause déjeuner en même temps. Brant était assis dans un coin de la salle, occupé à venir à bout de ses spaghettis tout en discutant d'un de ses patients avec une de ses collègues, et accessoirement petite amie quand la bombe fût lâchée. Voilà presque quatre ans qu'ils se connaissent, trois ans et demi qu'ils sont ensemble et bientôt deux ans qu'ils vivent tous les deux dans le même appartement mais l'idée du mariage ne lui avait jamais traversé l'esprit. Bien que les bruits des verres et des couverts se percutant étaient forts, Brant avait l'impression d'être devenu sourd, n'entendant que cette question sortie de nulle part raisonner dans son cerveau encore fatigué par la garde qu'il avait effectué la nuit même. Relevant la tête de son plat de spaghettis, il croisa le regard de la jolie brune, ce sourire aux lèvres, ses yeux remplis d'espoirs. Inconsciemment Brant se mord la lèvre inférieure, signe de nervosité chez lui mais qu'elle n'a jamais semblé remarquer avant. « Se marier ? Je pensais que tu voulais attendre d'être résident pour ça ? » Il espérait que son ton ne trahissait pas son manque d'envie flagrante mais son interlocutrice ne sembla pas s'en apercevoir. « Je sais mais nous deux, c'est du sérieux non ? Je ne me vois pas faire ma vie avec quelqu'un d'autre que toi. Pas toi ? » Brant détestait parler de ça, elle le savait très bien. Il l'avait déjà entendu se plaindre auprès de ses amies du fait que son petit ami n'était pas très loquace quand il s'agissait de parler de sentiments mais il n'y pouvait rien. Il aimait la jeune femme, tout du moins il essayait vraiment de l'aimer. Parce qu'il savait au fond que ce n'était pas le cas mais Brant ne se sentait pas capable d'assumer ce qu'il était vraiment. Il savait qu'elle attendait une réponse mais il ne pût s'empêcher de la faire languir un peu comme si cette apport de spaguettis allaient l'aider à trouver le courage de surmonter ce que son cœur lui criait de faire. « Bien sûr, mais ce n'était pas vraiment comme ça que j'aurais cru que tu verrais ta demande... » S'il y a bien quelque chose qu'il aimait chez lui, c'était son sens de la répartie. Il tenait ça de sa mère et il ne pourrait jamais la remercier assez de le lui avoir légué... Sa réponse sembla satisfaire la jeune femme, dont le sourire s'agrandit au point où le jeune Lincoln avait l'impression que la mâchoire de sa petite amie allait se décrocher. « Je voulais simplement m'assurer qu'on était bien sur la même longueur d'ondes. Mais, je te rassures, je compte avoir ta demande officielle dans les règles de l'art, un jour ou l'autre. » Le bipper de la jeune femme sonna, signalant la fin de leur pause et de la discussion. Regardant celui-ci, elle sourit légèrement et se leva avant de déposer un baiser sur les lèvres de Brant. « Surprends moi honey ! On se voit ce soir ! » Et sans dire un mot, elle s'éclipsa. Perplexe sur ce qu'il venait de se passer, Brant posa sa fourchette et repoussa son assiette. Son malaise était grand, mais i le fût encore davantage quand il croisa le regard d'un autre interne. Son cœur se mit à s'emballer comme à chaque fois et lorsqu'il vit la peine dans son regard, il détourna les yeux. Qu'était-il sensé faire ?

« Écoutes, on a vraiment plus rien à se dire, ça dure depuis trop longtemps et cette fois-ci, tu ne m'auras pas avec tes belles phrases tout droit sortie d'une comédie romantique à la con » Les bras croisés, l'épaule soutenu par un casier, Brant regarda son collègue enlever sa blouse et sa tenue. Il savait que ce moment finirait par arriver, il le savait à la seconde où toute cette histoire avait commencé, il y a cinq ans de cela. « Bordel, ça fait cinq ans ! Cinq ans !!!!!!! Cinq ans que j'attends que tu fasses quelque chose, que tu acceptes ce que tu es mais là, j'en peux plus. » Il le laissait déverser sa rage parce qu'il savait qu'il le méritait et qu'il en avait besoin. La porte du casier claqua violemment alors que le torse musclé de son interlocuteur disparût sous son tee-shirt. « Mais je t'aime... » Il savait que c'était minable comme défense, que c'était vraiment inapproprié et lorsque le brun se retourna pour lui faire fasse, il savait qu'il venait d'appuyer sur le mauvais bouton. « Tu m'aimes ? Tu m'aimes au point de me faire subir tout ça ? Tu n'as aucune idée de ce que j'ai traversé pour toi... Je t'ai vu épouser cette femme, j'étais présent durant cette putain de cérémonie à te voir lui promettre fidélité et amour alors que je savais très bien que tu ne perdais pas une seconde pour venir me rejoindre dans une chambre de repos. J'ai refusé les avances de dizaines de mecs et de femmes parce que j'étais naïf au point de me dire que tu finirais par faire ce que tu me promettais à chaque fois : Quitter ta femme ! Mas je me suis trompé et maintenant, c'est fini » La veste sur les épaules, il passa à côté de Brant qui lui agrippa le bras pour le retenir. « Tu ne peux faire ça, tu ne peux pas nous faire ça... » Se dégageant, son amant le poussa contre le casier et Brant ferma les yeux s'attendant à recevoir un coup. « Comment oses-tu me dire ça ? Regardes toi dans une glace avant de parler, je t'en supplies ! Restes dans ta petite vie pleine de mensonges mais quand un jour, tu décideras d'enlever ce bandeau que tu as sur les yeux, je ne serais plus là pour t'accueillir... » Frappant sur le casier d'à côté, il s'écarta de nouveau et Brant rouvrit les yeux. Le regardant s'éloigner, il le regarda alors qu'il s'apprêtait à ouvrir la porte du vestiaire des résidents. « Qu'est ce que je dois faire ? » Croisant le regard du brun, il le vit secouer la tête. « Ce n'est plus mon problème mais je crois qu'être honnête envers toi, ce serait déjà un début ! Et l'être avec ta femme aussi... Désolé, je vais être en retard ! J'ai un rendez-vous ce soir ! » Déglutissant, il sentit un poignard lui transpercer le cœur à ces mots. C'était donc pour ça qu'il avait eu le courage de tout arrêter ? Il avait trouvé quelqu'un d'autre ? Baissant les yeux, il sentit une larme couler le long de sa joue. La ressuyant d'un geste, il sortit de la pièce. Prêt à continuer cette mascarade qui durait depuis trop longtemps. La question était : Jusqu'à quand allait-elle durer ?

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