Inspire. Expire. Inspire. Expire. Tu pris une dernière inspiration, fermant les yeux pour te concentrer davantage, et franchis la grande porte menant directement à la morgue. Ce lieu dépourvu de toute chaleur, de toute humanité. Et pourtant, au centre de tous ces morts se trouvaient le Docteur Fitzpatrick. Elle semblait visiblement dans son élément, là. Après tout, tu ne pouvais que la comprendre : les morts ne jugent pas, ne critiquent pas, ne parle pas. Ils sont juste... morts. Tu pris quelques secondes avant de te mettre à avancer vers la jeune femme qui te servirait de guide tout au long de cette session d'apprentissage. Tu avais de la difficulté à comprendre où était le lien entre les morts et la chirurgie plastique, mais bon. Tu te prêtais au jeu... Et fallait quand même admettre que la présence de la docteur ne te dérangeait pas du tout. Tu arrivais même à l'apprécier, malgré tous les commentaires nébuleux et croches faits à son égard. « Je suis arrivée, Dr. Fitzpatrick. Que faisons-nous, aujourd'hui ? » dis-tu en ne pouvant pas t'empêcher de faire une grimace lorsque tu réalisais qu'un mort était placé sur la table du milieu. Il était clairement très amoché. Le pauvre.

Une femme était morte à la suite d’un accident de la route. Et bien que rien ne m’obligeait à cela, je tenais toujours à redonner de la dignité à un corps. Les morts devaient recevoir le plus grand des respects. Et je savais que mon respect pour les morts plus important que pour les vivants était l’un de mes défauts. Mais jamais aucun d’eux ne m’avait déçu. Ils étaient à l’écoute. La froideur de leur corps ne m’avait jamais dérangé. Quoi qu’il en soit, cette femme morte depuis 5 heures avait vu son visage perforé à plusieurs reprises au visage par de gros éclats de verre. J’avais immédiatement été subjugué par la beauté de la jeune femme. D’ordinaire, je ne m’occupais pas de la préparation funéraire mais avant que la jeune femme ne soit rendue à sa famille, j’avais tenu à lui rendre son visage. Mon autopsie terminée, j’avais finalement bippé Esther. Malgré ses défauts, j’aimais beaucoup cette résidente et cela tombait à pic vu qu’elle voulait se spécialiser dans la chirurgie plastique. Elle allait donc me faire un merveilleux travail.

Ajustant les points de fermeture sur la poitrine de la jeune femme, j’entendis la porte s’ouvrir. « Je suis arrivée, Dr. Fitzpatrick. Que faisons-nous, aujourd'hui ? » Je m’arrêtais alors et regardais la jeune femme. Docteur ? c’était bien formelle. Elle devait sans doute m’en vouloir pour lui avoir fait la morale la dernière fois pour ses autres activités. Mais cela avait été plus fort que moi. « Docteur Reynolds. » Posant mes outils, je retirais mes gants avant de tendre le dossier de la défunte pour qu’Esther en prenne connaissance. « Cette femme a besoin de point pour réparer son visage. J’aimerais la rendre en meilleur état à sa famille. Je veux que tu m’aides. Tu y vois un inconvénient ? »

Le frottement de tes espadrilles de sport fit un drôle de bruit sur le carrelage impeccable de la morgue. Ça te faisait presque sentir mal à l'aise d'être là; tout était tellement inerte, immobile. Il n'y avait que les cliquetis de l'horloge murale qui se faisait entendre. C'était vraiment une toute autre atmosphère que dans un bloc opératoire, ça c'est évident. « Docteur Reynolds. » me salua le docteur Fitzpatrick. Son visage était dépourvu d'une quelconque expression. C'est étrange puisque la semaine dernière, quand tu t'étais présentée pour la première fois à la morgue, elle t'avait paru un peu plus... chaleureuse. Tu ne posas pas de question, toutefois. C'était quand même une titulaire et dans un tel cas, nul ne sert de répliquer. « Cette femme a besoin de point pour réparer son visage. J’aimerais la rendre en meilleur état à sa famille. Je veux que tu m’aides. Tu y vois un inconvénient ? » Tu souris légèrement. Alors ça, c'était bien dans tes cordes ! Tu t'avanças un peu plus près pour pouvoir prendre le dossier que te tendais le Dr. Fitz et tu en lus rapidement les quelques pages. Un grave accident de la route... Eh merde. Il y en a de plus en plus, c'est déconcertant. Tu reposas la dossier sur un petite table non-loin du corps et t'avança vers la dame. Ça te pinça au coeur de voir ce visage détruit sous le choc de l'accident. Ça te fit un peu penser à toi. Sauf que toi, à l'inverse d'elle, tu avais survécut. « Non. Je peux le faire. Je suis même heureuse que tu aies pensée à moi... » commenças-tu, légèrement embarassée. « Après mon comportement de la dernière fois, j'aurais cru que tu ne me voudrais plus dans ton... ta morgue. » L'habitude de dire bloc... Il est vrai que lors de votre dernière rencontre, les choses s'étaient passées plutôt... de façon tendus. Paige, de son prénom, étant plus vieille que toi, elle s'était senti dans le droit de te faire des leçons de morales quant à tes activités « extra-scolaire ». Va savoir comment, elle en avait eu vent et à la moindre occasion, elle n'avait pas hésité à t'en parler, ce qui t'avait automatiquement frustrée.

« Non. Je peux le faire. Je suis même heureuse que tu aies pensée à moi... » Je relevais mon visage vers la jeune femme avec un léger sourire. Malgré ce qu'elle faisait, j'aimais bien la jeune femme et je ne voulais pas qu'elle se sente dévalorisée. « Après mon comportement de la dernière fois, j'aurais cru que tu ne me voudrais plus dans ton... ta morgue. » Mon sourire se crispa légèrement et je laissais échapper un léger soupire. Je rabaissais alors mon regard sur le corps de la jeune femme. «  Ce n’est pas parce que je porte une opinion sur ta façon d’agir en dehors de cet hôpital que tu es un moins bon médecin que les autres. Tu mérites comme tout le monde d’apprendre et d’être considérée comme à ta juste valeur. »

Oui, j’avais beau ne pas apprécier ce qu’elle faisait en dehors du boulot, je ne voulais pas pour autant la mettre sur la touche. Je n’étais pas comme cela, je n’en voyais pas l’intérêt. Si elle faisait cela, ce n’était pas par plaisir et je considérais qu’elle avait besoin plus d’aide qu’autre chose. La pénaliser pour cela, serait totalement injuste et je ne supportais pas cette idée. L’injustice je connaissais bien. J'avais d'ailleurs personnellement très envie de l'aider à arrêter cette activité. « Alors, comment comptes-tu procéder pour réparer le visage de la patiente. » Elle était là pour apprendre et j'étais son professeur du jour, j'allais donc lui apprendre ce qu'elle devait faire surtout que dans l'état de mort de la patiente, les techniques n’étaient pas tout à fait les mêmes. L’objectif n’était pas d’abimer plus la pauvre femme.