1.
On pourrait penser que j'ai un destin de bonheur tout tracé puisque je suis née à Reading. Cette petite ville anglaise a vu naître une jeune femme brune qui deviendra plus tard bien plus connue que moi et dont la vie sera un conte de fée. Oui je suis née dans la même ville que Kate Middleton, qui pendant un moment traînait avec ma bande d'amis au lycée. Je suis très jalouse de ce qu'elle est devenue, surtout quand moi je galère à l'hôpital. Cette femme est une quasi-idole pour moi et je ne me lasserais jamais de dire : "Kate ? Je l'ai croisé quelques fois mais rien de bien méchant". On n'a jamais été les meilleures amies du monde mais on a bien rigolé durant notre dernière année de lycée. Avant cela, on peut me décrire comme une enfant joyeuse, douée pour l'école et passionnée pour l'art. Mes parents m'encourageaient à poursuivre sur cette voie. Ils tenaient un pub assez connu dans la ville mais souhaitaient que je vive sans problèmes d'argent. Il y avait des mois où mes parents avaient du mal à payer leurs dettes. Ils ne me disaient rien, préférant ne pas m'affoler. Quand je leur ai dit que je voulais faire du violon, ils ont fait une drôle de tête. La charge des cours de violon était trop dure à payer pour eux. C'est alors ma grand-mère qui me paya mes cours de violon par charité et envie de donner le reste de son argent pour une bonne cause. J'ai tout de suite accroché avec l'instrument. Jouer me libérait et me permettait d'exprimer mes sentiments à travers du son. Lorsque j'ai dit à mes parents que je voulais faire ça toute ma vie, ils ont plutôt été sceptiques, préférant un métier où j'étais sûre de gagner bien ma vie. J'ai réussi à les convaincre. De toute façon je n'avais pas d'autre idée pour mon futur.
2.
Vous savez jouer ? J'apprends le violon depuis que j'ai 6 ans. Vous êtes un petit Mozart. Non je suis juste Ronnie Hevangelista. Je pris mon instrument et mis à jouer avec. C'était mon anniversaire, mes 18 ans. J'avais pas envie de périr dans mon trou anglais alors je me rendais à tous les castings possibles et inimaginables dans l'espoir de décrocher le gros lot : vivre de mon violon. L'Amérique était mon rêve et je savais que les gens qui me regardaient venait de San Francisco. Ce jour-là j'ai été prise après trois mois de castings intensifs.
Je pris l'avion pour la première fois. Nouveaux paysages, nouvelles têtes, nouvelle vie. J'ai tout appris dans le pays où tous les rêves sont possibles. Je ne regrette pas mais depuis ma venue je n'ai pas eu le temps de revoir mes amis anglais. Mes parents ont fait le déplacement deux fois mais pas plus. Ma grand-mère est morte et je l'ai appris deux semaines plus tard. J'ai l'impression d'avoir laissé filer une partie de ma vie. En retour j'ai récolté la gloire, la renommé, le travail plaisant, les voyages incroyables et l'amour. Devenir une star demande des sacrifices et ce n'est que depuis qu'on m'a diagnostiquée un syndrome que je m'en rends compte. Les gens qu'on aime nous manque toujours quand on croit avoir tout perdu.
3.
Il était beau, il était grand, il était musicien comme moi et attendait la fin de l'été pour me demander en mariage. Nous jouions dans le même orchestre parisien, orchestre dans lequel j'ai dû remplacer au pied levé le violoniste, atteint d'un cancer de la peau. Nous avions passée deux mois formidables et lorsqu'il a fallu nous séparer, nous nous sommes jetés dessus. J'ai aimé toutes ses caresses et ses sourires tendres au petit-déjeuner. La presse nous laissait vivre notre vie alors que demander de plus ? Cela faisait déjà trois ans et je savais qu'il avait acheté une bague chez Cartier (en hommage à notre lieu de rencontre). Et tout à basculer. Je ne sais pas pourquoi, je n'ai jamais su pourquoi mais il m'a quitté soudainement. Ce fut un des moments les plus douloureux de ma vie.
Ronnie, vient un peu par là ma chérie. J'arrive. Comme à mon habitude, j'étais dans la cuisine en train de lui préparer un bon petit plat. La cuisine est mon endroit de prédilection. Un endroit de détente suprême où je sais que mon amoureux ne mettra pas les pieds.
Ronnie, tu es d'accord qu'on peut se dire tout. Ben oui bien sûr. J'aime pas les discutions qui commencent comme ça. Il y en avait eu avant mais elles n'avaient jamais eu cette profondeur.
J'ai pas envie de tourner autour du pot très longtemps. J'ai envie que ça s'arrête. Qu'on ne se voit plus. Je veux changer de vie. Quoi ??? Tu veux me quitter ? Oui c'est ça. Désolée ma puce. Mais pourquoi ? C'est parce que je vais avoir 30 ans alors je suis vieille ? Je ne suis plus désirable pour toi ? Non c'est pas toi, c'est moi. On est plus des gamins, tu peux me le dire. Je te l'ai déjà dit, j'ai besoin de liberté. Mais je ne t'en laisse pas assez ? Et là, il claqua la porte. D'accord je m'étais emporté mais je ne savais toujours pas pourquoi il me quittait comme ça, sur le point de se marier, après trois ans d'amour intense. Ma vie à ses côtés se finissait ce qui pour moi était comparable à la fin du monde. Il était l'homme de ma vie, je le savais. Je voulais qu'il revienne plus que tout au monde. Mais il n'est pas revenu. Il ne sonnait plus chez moi, il ne m'appelait pas, ne me faisait même pas un signe. J'ai alors commencé à moins manger, à prendre un verre d'alcool avant les repas, à me faire du mal. Personne ne voyait ce qui m'arrivait, mais moi je le sentais. Je sentais que dans pas longtemps j'allais faire une connerie.
4.
Hé Ronnie c'est quoi ça ? C'était la question fatidique que me posait une amie rentrée par hasard chez moi voyant que je ne répondais pas. Je laissais toujours ouvert depuis quelques temps, depuis que ma tête et mon corps s''étaient mentalement séparés. Elle m'avait vu assise par terre contre le frigo, les veines tailladées et un verre dans la main dans lequel les médocs flottaient à la surface.
Mais Ronnie qu'est-ce que tu fais ? Ah ben tu viens me dire au-revoir c'est gentil ça. Tu ne crois pas un instant que je vais te laisser faire ça. Heu ... si. Elle m’ôta le verre des mains avec une telle violence que je ne puis riposter.
Hé mais c'est à moi ! C'est quoi ce truc, ça pue l'alcool ! C'est un mélange personnel ... Viens avec moi ! Elle me souleva avec brio et prit de l’essuie-tout pour penser mes plaies. Je tremblais, mes pieds n'arrivaient pas à tenir debout et en plus de ça je faisais une sorte de malaise. Je tombai dans les pommes d'un coup et ne me réveilla qu'à l’hôpital. Je déteste cet endroit ! Je fais tout pour l'éviter alors ce soir-là je l'ai encore en mémoire ! Et les questions après ... mais arrêter de me poser des questions c'est ma vie privée ! Je n'aime pas qu'on fouille dans ma vie privée. Contrairement aux autres stars, j'ai été assez protégée jusque là par mon métier peu populaire de violoniste professionnelle. Ma chut a été violente et non programmée, ce qui fait que je suis restée une semaine au moins à l'hôpital pour me soigner. C'est à ce moment aussi qu'on m'a découvert un syndrome rare mais très lourd à porter : le syndrome de Sissi (oui comme l'impératrice). On le qualifie comme un syndrome dépressif, agitation, nervosité, hyperactivité physique, sautes d'humeur, jeûne, culte exagéré du corps, problèmes d'estime de soi et de nombreuses tentatives d'auto-traitement. Le problème c'est que tout le monde que tout cela est une invention. Je ne le connaissais pas avant mais j'ai bien été obligée de l'accepter surtout que mon état n'a fait qu’empirer après. Mais je me soigne. Je vais très souvent, trop souvent pour moi, à l'hôpital pour des test ou des prises de sangs mais à part me donner des vitamines pour l'hiver et des cacher calmants ils ne peuvent pas grand chose puisque c'est rare. Bref je dois attendre un peu. Mais je sais surtout que si mon amie n'avais pas été là ce soir-là, je ne serais plus là.
5.
Pourquoi vouloir venir en aide aux enfants démunis d'Afrique ? Parce que le sourire d'un enfant met fin à toutes les souffrances. Je crois tout ce que je dis. Entre deux allez-retour à l'hôpital j'ai décidé d'occuper mon arrêt maladie à faire le bien autour de moi. Je vais sur le terrain, voir les pauvres, les gens qui n'ont plus rien. La vie est trop courte alors je préfère passer ce qu'il reste de la mienne à donner. De l'argent oui mais aussi de l'amour. Je me suis tournée vers les enfants mais je manifeste aussi beaucoup pour les droits civils (notamment pour le mariage homosexuel ou le droit des femmes dans le monde). Je mets à profit ce que je suis pour aider les autres. C'est pas toujours facile parce que certaines crises se produisent en public mais j'arrive à lever la tête. Les gens sont compréhensifs en général mais j'ai le regret de vous dire qu'il y a des idiots partout. Ma maladie empiète beaucoup sur ma vie mais les médicaments permettent de la gérer le mieux possible. Cet engagement humanitaire, j'aurais dû le faire depuis longtemps mais je devais être trop obnubilé par moi-même pour voir le reste du monde. En tout cas la maladie m'a ouvert les yeux mais cela ne veut pas dire que je suis bien à 100% dans mon corps et dans ma tête.